La Douleur En QuestionsMédicaments de la douleur Chapitre 3Auteur(s) : SFETD / CNRD Date de parution : 2018 Retourner au sommaire
Comment choisir un médicament antalgique ? Comment dois-je prendre mes médicaments antalgiques ? N’y a-t-il que les médicaments pour soulager ma douleur ? La douleur peut être soit aiguë (présente depuis peu de temps), comme lors d’une blessure, soit chronique (qui dure dans le temps ou se répète), comme lors des migraines ou des douleurs neuropathiques. Ces deux types de douleur apparaissent selon des mécanismes différents, parfois intriqués. Un antalgique efficace doit pouvoir contrecarrer le mécanisme de la douleur, et agir en fonction de l’intensité, la durée, la localisation de la douleur. Afin de favoriser une bonne observance, le médicament doit être bien supporté et tenir compte des caractéristiques du patient, de ses traitements déjà en cours. Dans le cas d’une douleur aiguë, la guérison de ce qui cause la douleur a également un effet antalgique et on peut envisager un retour à l’état antérieur. Dans une évolution chronique il est impossible d’éliminer, ni même parfois d’identifier ce qui est, ou a été, à l’origine des douleurs. Quels sont les médicaments de la douleur ?Il existe plusieurs façons de classer les familles d’antalgiques, selon l’endroit où ils agissent, le mécanisme de leur action, et leur indication. Schématiquement, la plupart des douleurs aiguës dites nociceptives peuvent être traitées avec du paracétamol, des anti-inflammatoires, des opioïdes (voir chapitre 4), et si elles sont induites par les soins on peut ajouter les anesthésiques locaux et le MEOPA (mélange équimolaire d’oxygène et de protoxyde d’azote). Pour certaines douleurs chroniques, en particulier d’origine neuropathique, on peut prescrire des médicaments agissant sur le système nerveux, et classés à l’origine comme antidépresseurs ou antiépileptiques. Il existe aussi des médicaments plus spécifiques, comme certains traitements de la migraine. Quelles sont les associations d’antalgiques justifiées ou contre-indiquées ?Pour un maximum d’efficacité, on peut associer des médicaments dont les actions sont complémentaires. Ainsi, pour une efficacité donnée, on peut utiliser des doses moins importantes de chaque produit et limiter ainsi les éventuels effets indésirables. Les meilleures associations sont dites synergiques ; ainsi, il peut être utile d’associer du paracétamol (ou un anti-inflammatoire) avec un opioïde. Il ne faut généralement pas associer des médicaments issus d’une même famille, sous peine d’efficacité limitée, de surdosage, avec un risque d’effets indésirables augmenté (ne pas associer deux anti-inflammatoires par exemple). Il existe des exceptions à cette règle, quand par exemple on ajoute à une morphine lp (à libération prolongée), soit une morphine li (à libération immédiate) afin d’obtenir le dosage final nécessaire pour le soulagement (c’est ce qu’on appelle une titration). N’y a-t-il que des traitements médicamenteux pour traiter les douleurs chroniques ?Non. Il existe, en plus des médicaments, beaucoup de techniques dites « non-pharmacologiques (voir chapitre 5) qui peuvent avoir une grande utilité. Dans une prise en charge reposant sur l’utilisation conjointe de plusieurs stratégies lors de douleurs chroniques, on estime que la part des médicaments reste très limitée (généralement inférieure à 30 %...). Pourquoi ai-je toujours mal malgré les antalgiques ?On doit rappeler que l’objectif zéro douleur est très difficile concernant les douleurs chroniques. Néanmoins, face à l’échec d’un médicament, on peut imaginer plusieurs situations :
Un suivi médical de qualité permet de repérer les erreurs, les effets indésirables, la tolérance, ou une mauvaise observance. Comment traiter les douleurs neuropathiques ?Les douleurs neuropathiques (voir chapitre 10) ont un mécanisme particulier lié à une altération du système nerveux. Leur traitement médicamenteux fait donc appel à des produits qui ont une action spécifique sur le système nerveux. C’est le cas des médicaments connus depuis longtemps comme antidépresseurs ou antiépileptiques. Ainsi, lorsqu’on prescrit ces médicaments pour une douleur neuropathique, cela ne suppose pas obligatoirement que le patient soit considéré comme dépressif ou épileptique. D’ailleurs, les doses employées pour une efficacité antalgique ne sont pas nécessairement les mêmes. Le médecin me dit de prendre des antalgiques avant que la douleur soit trop forte, pourquoi ?La douleur est un phénomène qui peut s’auto-entretenir. En sensibilisant le système nerveux, une douleur aiguë persistante peut même se convertir en douleur chronique. Par ailleurs, la confrontation à la douleur répétée, même supportable, peut générer des conséquences qui ont un impact sur la situation. Par exemple, l’anxiété générée par la douleur peut augmenter l’intensité douloureuse. Il est donc nécessaire d’agir d’emblée efficacement. J’ai très mal, mais, si je prends des antalgiques, est-ce que cela va fausser les examens ?Non, il s’agit d’une ancienne croyance, en particulier lors de l’exploration des douleurs abdominales. Actuellement, il est recommandé de traiter la douleur en priorité, ce qui permet d’ailleurs de réaliser les premiers examens et les soins dans de bonnes conditions, et avec une bonne qualité. Si je prends des antalgiques forts maintenant, que me donnera-t-on si la douleur devient encore plus forte ?Si la douleur persiste malgré un antalgique réputé puissant, on peut supposer que le mécanisme de la douleur a été mal identifié, et qu’il faut envisager de modifier la nature de l’antalgique. On peut aussi prévoir de compléter avec des méthodes non médicamenteuses. J’ai très mal et on me propose des antalgiques par voie orale, est-ce que ce ne serait pas plus efficace d’avoir une perfusion ?Une idée reçue laisse penser que l’injection d’un médicament serait plus efficace que la voie orale. C’est souvent faux, en particulier dans le cas des anti-inflammatoires où cela n’évite pas pour autant les effets indésirables digestifs. De plus la voie injectable nécessite l’intervention d’un soignant et est susceptible d’être elle-même douloureuse. Il existe seulement certaines indications précises où il peut être intéressant d’utiliser la voie injectable pour raccourcir le délai d’action. Comment dois-je prendre mes médicaments ? Combien ? A quel rythme ? Combien de fois par jour ?La douleur continue nécessite un traitement de fond, c’est-à-dire un traitement que l’on prend tous les jours, quelle que soit l’intensité de la douleur. Le déclenchement d’accès douloureux implique la prescription d’interdoses (doses de médicament que l’on va prendre en fonction de l’intensité douloureuse). Pour les douleurs aiguës prévisibles, une administration anticipée doit être mise en place (exemple : donner de la morphine orale en libération immédiate une heure avant un soin douloureux). L’ordonnance précise la façon de prendre ses médicaments. En fonction du type de douleur, du devenir du médicament dans l’organisme, du délai et de la durée de l’action qui en découlent, il peut être nécessaire d’observer une ou plusieurs prises par jour. Certains médicaments nécessitent plusieurs modifications de dose avant d’être pleinement efficaces. Il est toujours utile en cas de doute de redemander conseil à son médecin ou son pharmacien. Si je prends une double dose, est-ce que la douleur va disparaître plus vite ?Non, car le délai d’action de l’antalgique ne dépend pas de l’importance de la dose, mais de la voie utilisée pour administrer le médicament et de la façon dont l’organisme l’utilise. De plus, il existe un risque de surdosage. Vais-je devoir prendre des médicaments toute ma vie ?La douleur aiguë disparaîtra avec la guérison du problème d’origine. En cas de douleur chronique, les médicaments ne sont qu’une partie d’une panoplie de traitements qu’il est nécessaire de mettre en œuvre. Il est important de réévaluer et discuter avec le prescripteur de leur utilité et acceptabilité dans la vie quotidienne. En cas d’aggravation brutale de la douleur, il peut être utile de disposer chez soi d’une ordonnance d’antalgiques « de secours ».
Points-forts
Composante du succès d’un traitementLa réussite d’un traitement est liée à la qualité relationnelle soignant-patient, à la précision des informations transmises à la personne malade, et à la confiance qui en découle. L’action du médicament doit être connue et acceptée du patient qui va en attendre un soulagement perceptible. Information aux personnes maladesAttention ! Le patient et son entourage doivent absolument être informés des effets indésirables des antalgiques prescrits, en particulier du risque de somnolence… la conduite automobile doit être contre-indiquée si nécessaire. Certains inconvénients, comme les nausées, sont volontiers passagers et ne nécessitent pas l’arrêt du traitement ; d’autres, comme la constipation lors de la prise d’opioïdes, nécessitent d’être systématiquement pris en charge. Interrogez systématiquement votre médecin, votre pharmacien. Formes LP et LILa libération prolongée (LP) signifie que le principe actif du médicament est libéré sur une durée longue afin d’obtenir une efficacité en continu et réduire le nombre de prises. A l’inverse, la libération immédiate (LI) permet à l’organisme de disposer du principe actif dans un délai plus bref et sur une durée plus courte. Mise en gardeLa prescription et la prise d’un antalgique sont adaptées à un patient et ne doivent pas être transposées pour une autre personne sans avis médical même dans le cas d’une même pathologie.
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