La Douleur En QuestionsDouleur aigue, douleur chronique, mécanismes Chapitre 1Auteur(s) : SFETD / CNRD Date de parution : 2018 Retourner au sommaireDouleur aiguë, douleur chronique
Que faire Devant une douleur aiguë ? Pour calmer une douleur sans risquer de masquer un diagnostic ? Pour choisir un traitement antalgique efficace ?
Douleur chronique Qu’est-ce que c’est ? Que faire ? Que faire devant une douleur aiguë ? Réagir face à une douleur aiguë est une urgence. C’est une des 5 constantes vitales dans tout service d’urgence dans le monde au même titre que la température, la tension artérielle, le rythme cardiaque ou encore la saturation en oxygène. Diagnostic et traitement antalgique doivent être menés en parallèle. À calmer une douleur, court-on le risque de masquer un diagnostic ? La douleur aiguë est un signal d’alarme utile au diagnostic étiologique. Néanmoins, il est nécessaire de commencer par la contrôler par une antalgie précoce dès que ses caractéristiques ont été identifiées. Plusieurs études ont démontré que l’administration d’opioïdes puissants à des malades avec un tableau de douleur abdominale aiguë (comme une appendicite par exemple) ne pénalise pas la démarche diagnostique. Quel traitement choisir en première intention ? Le traitement antalgique prend en compte l’intensité de la douleur et le type de pathologie. Il arrive que la douleur prive la personne malade de tout moyen de s’exprimer. L’urgence est de la soulager pour lui permettre de communiquer ce qu’elle perçoit et de l’évaluer (voir chapitre 2). En présence d’une douleur sévère, il convient de soulager la personne en utilisant de la morphine en première intention, sauf dans certains cas, comme par exemple : migraine, douleur neuropathique… Que faire d’autre pour soulager une douleur aiguë ? La disponibilité, l’écoute empathique, la présence des proches, la clarté des explications, tendent à réduire l’anxiété du malade et à diminuer l’intensité de sa douleur. Il est nécessaire de traiter la cause de la douleur quand c’est possible. Ne pas oublier qu’il existe des traitements spécifiques complémentaires : immobiliser les foyers de fracture ou procéder au strapping de fractures costales, pose de glace sur une articulation enflammée, pose de chaud sur une contracture musculaire… J’ai une violente douleur dans la poitrine, est-ce que je fais un infarctus ? Est-ce psychologique ? L’anamnèse (l’histoire de votre douleur), l’examen clinique, les examens paracliniques orientés permettent le plus souvent d’évoquer un diagnostic ou de programmer des examens complémentaires pour préciser les causes organiques de la douleur. À souligner qu’une anxiété majeure accompagne la plupart des douleurs aiguës somatiques (infarctus, embolie). À l’inverse, de très nombreuses personnes arrivent en état de crise aux urgences avec des douleurs thoraciques qui se révèlent souvent être des douleurs d’origine anxieuse ou dépressive. Le saviez-vous ? Nos douleurs sont cartographiées par zones ! Lorsque que l’on a mal dans la poitrine, plusieurs causes peuvent être possibles car la zone qui s’active au niveau de la moelle épinière dans une atteinte du coeur est la même que celle qui s’occupe de l’estomac et qui s’occupe de la peau à gauche. De ce fait, l’examen clinique et l’interrogatoire (et l’ECG, examen explorant le fonctionnement du coeur !) vont être importants pour dire si vous faites un infarctus, un ulcère à l’estomac ou une névralgie intercostale. Cela est d’autant plus vrai chez le diabétique ancien (les fibres sensitives ont été abîmées par le diabète et fonctionnent moins bien), chez l’enfant (les enfants ont du mal pour exprimer et localiser leur douleur : leur image du corps n’est pas encore en place) ou chez les personnes âgées (une douleur de genou peut être en fait une douleur projetée de la hanche !). Qu’est-ce qu’une douleur chronique ? Il s’agit d’un syndrome multidimensionnel exprimé par la personne qui en est atteinte. Il y a douleur chronique, quelles que soient sa localisation et son intensité, lorsque la douleur :
Lorsqu’elle devient chronique, la douleur perd sa « finalité » de signal d’alarme et elle devient une maladie en tant que telle quelle que soit son origine. La douleur chronique est fréquemment associée à des facteurs de renforcement qui participe à son entretien comme :
Que faire en cas de douleur ? Il est important d’en parler à son médecin afin de faire les examens qui s’imposent pour avancer sur le diagnostic. Des structures spécialisées de la douleur chronique, dans son évaluation, son diagnostic et son traitement, existent partout sur le territoire français. Le délai de consultation est long (plusieurs mois) car elle touche 30 % de la population française. Néanmoins, il est important de prendre rendez-vous, même s’il faut attendre, et de préparer ses examens et son questionnaire d’évaluation de la douleur afin de pouvoir aborder votre consultation avec toutes les cartes en main !
LE SAVIEZ-VOUS ? Pour obtenir la liste des structures de la douleur en France, vous pouvez cliquer à cette adresse : Pour réaliser un questionnaire de la douleur, vous pouvez prendre contact avec la Structure douleur chronique qui serait susceptible de vous accueillir ou remplir celui de la Haute Autorité de santé à cette adresse : https://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/douleur1.pdf (annexe 7 page 83) Pour avoir des informations sur les douleurs, vous pouvez consulter le site de la Société française d’étude et de traitement de la douleur (SFETD) à cette adresse : Enfin, vous n’êtes pas seul ! De nombreuses associations portant sur la douleur chronique ou des diagnostics plus précis de douleur chronique existent un peu partout en France, alors restez connecté !
Points fortsPrivilégier un traitement antalgique précoce et efficace. Cette mise en place limite l’apparition de phénomènes neurochimiques qui peuvent amplifier les messages nociceptifs. ATTENTION Certaines douleurs aiguës sévères ne relèvent pas des opioïdes (migraine, névralgie faciale essentielle, douleur neuropathique, etc). LA DOULEUR CHRONIQUE C’est une douleur qui dure depuis plus de 3 à 6 mois malgré un traitement bien conduit. Elle s’accompagne de retentissements sur la vie quotidienne tels que la gêne pour se déplacer, pour avoir des activités, pour entretenir des relations professionnelles et /ou familiales. Elle nécessite une prise en charge globale : médicamenteuse, psychologique et sociale. Elle touche 30 % de la population française, toutes causes confondues, enfants et adultes, hommes et femmes. À voir : http://www.sfetd-douleur.org/la-douleur-chronique-cest-quoi-exactement
La douleur : comment ça fonctionne ?
Pourquoi... ... J’ai mal ? Je souffre différemment selon les jours ou mes préoccupations du moment ? La douleur ne s’arrête jamais ? Pourquoi j’ai mal ? La douleur est un signal d’alarme qui sert à repérer une agression et permet de réagir. Par exemple, si je me brûle en touchant une plaque chauffante, je vais vite retirer ma main en ressentant la douleur. Un message est alors envoyé au cerveau pour l’alerter, il reçoit des informations douloureuses en masse. Il s’agit d’une douleur nociceptive. La douleur peut aussi traduire une lésion du système nerveux lui-même (cerveau ou nerfs périphériques). Dans ce cas, le système qui transmet et permet de diminuer le message douleur est défaillant. Il s’agit de la douleur neuropathique (voir chapitre 10). Par exemple, lors d’un zona, la douleur persistante créée se manifeste par des sensations de brûlures, de fourmillements, de décharges électriques ou encore d’engourdissement. Il existe également d’authentiques douleurs sans pour autant qu’il y ait lésion : on parle alors de douleurs dysfonctionnelles ou nociplastiques, telles que celles décrites dans la fibromyalgie par exemple. J’ai mal, cependant mes examens sont normaux, pourquoi ? Même si l’imagerie a fait beaucoup de progrès en l’espace de 20 ans, il n’en demeure pas moins que de nombreuses lésions ne se voient pas : 1) au début d’une maladie, comme dans la polyarthrite rhumatoïde, les lésions sur l’imagerie ne se voient pas au premier stade ; 2) la lésion peut être trop petite pour être vue, comme les lésions nerveuses après une opération ; 3) la douleur est multifactorielle, ce qui est le cas le plus fréquent, et plusieurs explications peuvent être possibles, même si les examens ne montrent rien (par exemple, dans le cadre d’une algodystrophie, ou dans le cadre de certaines douleurs neuropathiques). 4) dans les douleurs dysfonctionnelles (cf. encadré), l’examen clinique suffit à faire le diagnostic : en effet, il ne viendrait pas à l’idée de tester votre patrimoine génétique pour diagnostiquer une migraine. C’est pourtant un authentique diagnostic ! D’autre part, sachez qu’il n’y a pas de lien entre l’importance de la lésion et la douleur : des personnes avec une hernie discale de taille importante peuvent ne pas avoir de conséquence clinique. La douleur, ça se passe dans ma tête ? Eh oui ! Car jusqu’à présent votre cerveau est dans votre tête, et c’est lui qui commande ! La douleur possède trois composantes qui sont bien cartographiées au sein de votre cerveau :
Tout se complique quand ces trois mécanismes deviennent trop performants. Si la composante sensori-discriminative est trop importante, la douleur localisée va se généraliser ou s’étendre. C’est le cas quand une fracture du poignet se complique d’une algodystrophie qui elle-même se complique d’un syndrome épaule-main ! Si la composante affectivo-émotionnelle est trop puissante, il faut penser à rechercher un retentissement anxieux ou dépressif, voire des maladies nécessitant un suivi psychiatrique et psychologique sur plusieurs mois, comme l’état de stress post-traumatique ou la dépression. Si la composante cognitivo-comportementale est trop puissante, on peut retrouver une kinésiophobie (peur du mouvement) qui conduit certaines personnes à ne plus oser faire certains mouvements et à se « sur-adapter » à leur environnement, prenant parfois des attitudes plus nocives encore, par peur de reproduire un comportement qui pourrait amener à la douleur. Le cas le plus connu est la personne qui a fait un lumbago et qui n’ose plus se baisser, ou qui s’assoit avec trop de précautions, de peur de se bloquer à nouveau. J’ai moins mal quand j’ai l’esprit occupé… Beaucoup plus si j’y porte attention… La douleur change et se transforme. Elle n’a rien d’imaginaire. Son intensité se module selon le contexte familial, professionnel, social, les émotions perçues, le niveau d’anxiété et de dépression. La mémoire d’anciens souvenirs douloureux peut renforcer sa perception. J’ai de violentes douleurs… Mes douleurs persistent… Dois-je craindre une maladie grave ? Il n’y a pas forcément de lien entre l’intensité ou la persistance de douleurs et la gravité de la maladie qui les provoque. J’ai toujours mal alors que ma maladie est guérie ! C’est une possibilité, par exemple après un zona. La maladie guérie et le virus disparu, le nerf endommagé peut continuer à envoyer un signal douloureux. D’autres lésions du système nerveux (traumatisme médullaire, amputation) déclenchent le même phénomène. Le traitement s’appuie sur d’autres médicaments que les antalgiques habituels : certains antiépileptiques, antidépresseurs, lidocaïne en patch et même capsaïcine (piment !) mais aussi sur des techniques non médicamenteuses : neurostimulation transcutanée, hypnose, etc. Peut-on soigner la douleur autrement qu’avec des médicaments ? Pour soulager certaines douleurs, on peut faire appel à des traitements dits physiques comme la masso-kinésithérapie, les contentions (corset de maintien lombaire, collier en mousse), la chaleur, le froid ou l’électrothérapie. La relaxation, l’hypnose, la sophrologie et différentes psychothérapies contribuent à diminuer l’anxiété et le stress, ce qui fait décroître la perception de douleur (voir chapitre 5). Certaines douleurs sont rebelles aux médicaments, que faire ? Les formes de douleur sont multiples. Leurs causes et leurs mécanismes doivent être précisément identifiés pour permettre de choisir le traitement (médicaments ou autres moyens thérapeutiques). Toutes les douleurs ne sont pas guérissables et il est important de traiter chaque composante de la douleur, ce qui veut dire que le traitement médicamenteux est aussi important que la prise en charge psychologique et que les techniques non médicamenteuses. Il vous sera parfois proposé de participer à un programme d’éducation thérapeutique afin d’apprendre à mieux gérer la douleur (voir chapitre 5). Avoir mal, ça dépend de l’âge ? On a mal à tous les âges de la vie. Le système de transmission de la douleur fonctionne dès le sixième mois de la vie intra-utérine. Les nouveau-nés peuvent donc percevoir la douleur. Les personnes âgées, elles aussi, sont d’autant plus vulnérables à la douleur qu’elles peuvent être dans l’incapacité de communiquer. Le fait d’avoir mal est complètement indépendant de l’âge, d’un éventuel handicap ou même d’un polyhandicap.
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001-Chapitre 1 - Douleur aigue_ chronique_ mecanismes.pdf |