La Douleur En QuestionsOpioïdes Chapitre 4Auteur(s) : SFETD / CNRD Date de parution : 2018 Retourner au sommaire
QUAND Prescrire un traitement avec un opioïde (faible ou fort) ? Débuter un traitement avec la morphine ? Utiliser les autres opioïdes ?
Que sont les opioïdes ? Ils existent à l’état naturel dans notre organisme. De nombreux organes (cerveau, tube digestif) fabriquent et libèrent des substances appelées opioïdes endogènes (endomorphine ou endorphine). Ces substances participent au bon fonctionnement de notre corps, notamment au contrôle de la douleur. Les opioïdes exogènes utilisés dans le traitement de la douleur sont soit extraits du pavot (codéine, morphine, opium), soit des opioïdes de synthèse (tramadol, fentanyl, oxycodone). Ils peuvent être prescrits sous différentes formes galéniques : comprimé, gélule, solution buvable et injectable, patch… Où agissent les opioïdes ? Les molécules agissent sur les récepteurs des opioïdes endogènes et miment leur action. Les sites antalgiques sont principalement au niveau du système nerveux central (cerveau et moelle épinière) et périphérique (nerfs et terminaisons nerveuses) lors d’une stimulation douloureuse. Il existe des récepteurs opioïdes dans la plupart des organes, ce qui explique les autres effets associés aux opioïdes (myosis, nausées, constipation). Quand prescrire un traitement par opioïde (faible ou fort) ? La classification en opioïdes faibles (palier 2) ou forts (palier 3) a été proposée en 1986 par l’Organisation mondiale de la santé pour la prise en charge de la douleur cancéreuse. Par extension, cette classification est souvent utilisée pour tous les types de douleur. À dose équi-analgésique (apportant le même effet anti-douleur), une faible dose d’opioïde fort peut être mieux tolérée qu’une forte dose d’opioïde faible. Les opioïdes faibles sont prescrits pour des douleurs nociceptives modérées, soit d’emblée, soit lors d’échec d’un antalgique de niveau 1 (paracétamol, anti-inflammatoires). Le délai d’évaluation doit être adapté à la durée d’action de l’antalgique et le changement de niveau effectué selon l’intensité de la douleur. Il n’y a pas de critère absolu de choix. Les opioïdes faibles sont tous des agonistes purs. La prescription d’opioïdes forts est recommandée pour des douleurs nociceptives, lors d’échec d’un antalgique de niveau 2 ou d’emblée pour une douleur intense dans le cas de :
Pour la douleur du cancer, comment commencer un traitement avec la morphine ? La morphine est l’opioïde fort de première intention pour traiter la douleur cancéreuse. Dans la mesure du possible, la voie orale est privilégiée. Du fait des grandes variations interindividuelles, il faut toujours réaliser une titration initiale. Le traitement utilise des formes orales à libération immédiate ou libération prolongée en association avec des interdoses à libération immédiate. Lors de la titration initiale (ou de toute modification posologique), une évaluation quotidienne est indispensable pour juger de l’efficacité antalgique et de la tolérance du traitement. Quels sont les principaux effets indésirables des opioïdes ? En administration chronique, la constipation est pratiquement inévitable et nécessite dès la première prise des mesures hygiéno-diététiques et des laxatifs. La somnolence survient essentiellement lors de la phase de titration du traitement et doit disparaître en quelques jours. Sa réapparition ou sa persistance au-delà de cette limite doit faire rechercher un surdosage, un trouble métabolique, une potentialisation par des traitements associés. Certains troubles ont tendance eux aussi à diminuer avec le temps : nausées, vomissements. Les sueurs, les cauchemars, la dysurie, le prurit, les troubles de l’attention, de la concentration, de la mémoire, les hallucinations, les myoclonies, peuvent survenir et sont plus ou moins bien tolérés. Pour la douleur du cancer, comment remplacer un opioïde par un autre (rotation) ? La diversité des opioïdes disponibles permet de remplacer un opioïde par un autre (rotation) quand surviennent des effets indésirables rebelles ou en cas d’inefficacité ou de perte d’efficacité. Cette rotation doit être faite avec une réévaluation précoce de l’efficacité et de la tolérance de la nouvelle molécule. La rotation se fait en général sur la base d’une équi-analgésie. Et pour les douleurs chroniques non cancéreuses ? La morphine, l’oxycodone et le fentanyl sont les seuls opioïdes forts ayant l’AMM pour le traitement de toutes les douleurs chroniques non cancéreuses. En revanche, seules la morphine et l’oxycodone sont remboursables dans les indications des douleurs chroniques non cancéreuses. Comme indiqué dans les recommandations françaises publiées en 2016, il est recommandé d’introduire les opioïdes forts uniquement après un diagnostic précis de l’étiologie des douleurs chroniques ; échec des traitements médicamenteux de première intention donnés aux doses maximum tolérées et prise en charge globale du patient. Enfin, la décision et les objectifs doivent être partagés avec le patient qui est informé des bénéfices attendus et des événements indésirables encourus, le tout s’intégrant dans un contrat de soin. Il est recommandé de ne pas les utiliser dans les douleurs nociplastiques (fibromyalgie notamment) et les céphalées primaires (migraine notamment). Quand arrêter un traitement avec un opioïde fort ? L’arrêt ou la diminution du traitement se fonde sur l’évaluation de l’intensité de la douleur et le soulagement de la personne, et non sur l’évolution favorable de la pathologie. Comment arrêter un traitement avec un opioïde fort ? Il ne faut jamais arrêter un traitement opioïde fort sans avis médical : une diminution des doses par paliers est nécessaire. Points-forts
PARTICULARITES DE L’ORDONNANCE POUR OPIOÏDES FORTS La prescription est faite sur une ordonnance sécurisée. Le nom du médicament est inscrit en toutes lettres. La durée maximale est de 28 jours. Pour les formes injectables d’opioïdes, la durée de prescription est de 7 jours (sous-cutanés ou intraveineux). Cette durée est de 28 jours lors de l’utilisation d’un système actif de perfusion.
LES SITUATIONS OU LES OPIOÏDES NE SONT PAS INDIQUES Céphalées primaires (dont migraine et algie vasculaire de la face) Névralgies faciales essentielles Douleurs nociplastiques (dont la fibromyalgie)
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04-Chapitre 4 - Opioides.pdf |